Tout Leloup, le bon comme le mauvais
par Patrick Gauthier
dans Le Journal de Montréal, 17 avril 2004
Article
Ça s'intitule Exit, mais le testament musical de Jean Leloup, deux CD enregistrés devant public et un dévédé montrant sa sortie (d'où le titre), donne souvent le goût d'appuyer sur eject! Car Exit, c'est TOUT Leloup. Le mauvais comme le bon.

En décembre dernier, après un dernier concert à Saint-Jean, Jean Leloup cessait d'exister.

Son "suicide" allait prendre la forme d'un sacrifice: l'artiste allait devoir immoler par le feu sa guitare - une Fender Jazzmaster 1959 -, son chapeau haut de forme et ses bottes afin de faire une croix sur son personnage.

Exit, qui sera dans les bacs ce mardi, nous montre les derniers moments de Leloup, redevenu depuis Leclerc (le film est d'ailleurs une réalisation de Jean Leclerc).

On parle de film parce qu'Exit est avant tout un film. Les deux CD qui l'accompagnent sont simplement la bande son de ce film.

D'où la frustration qui gagnera plusieurs fans qui écouteront les disques.

Car ceux qui attendent un disque live de Jean Leloup, la captation d'un concert, du début jusqu'à la fin, seront déçus: Exit est un collage, pas toujours adroit, de moments enregistrés en concert ne donnant jamais une impression de continuité.

Remarquez que ça demeure assez fidèle à l'original: Jean Leloup, sur scène, passe souvent du meilleur au pire, parfois même au cours de la même chanson.

On en a un exemple frappant d'entrée de jeu: Leloup interrompt Berta, première chanson au programme après l'intro, pendant cinq bonnes minutes, histoire de délirer un petit peu. Très irritant, du moins sur disque, où les chansons se terminent parfois abruptement sans qu'on sache trop pourquoi.

Sur film, c'est beaucoup mieux. À cause du chemin parallèle que suit Leloup vers sa sortie, on prend plus conscience qu'il s'agit de la dernière fois qu'on le voit à l'oeuvre.

Certaines séquences du film sont d'ailleurs très émouvantes. Ce plan serré qui nous montre Leloup de profil chantant, seul, Je suis parti - "Jamais je ne reviendrai" - pourrait bien arracher une larme à ses fans.

D'ailleurs, on se rend compte, à regarder Exit, que Leloup a parlé souvent de fuite, d'évasion, de départ ou de mort ces dernières années dans ses chansons. La dernière pièce livrée sur scène est Promeneur.

Pour ce qui est des raisons profondes derrière cette mort symbolique - et parfois humoristique, il faut bien le dire. Par exemple, à la toute fin, l'artiste dit: C'est la fin de Jean Leloup et le début de Pierre Leloup! -, quand aux raisons de cette mort, donc, le principal intéressé, fidèle à son habitude, reste vague, incohérent.

On soupçonne des problèmes de chars - il envie la Jetta de son ami -, des problèmes relationnels - il aimerait une épouse et des enfants -, mais je crois bien que c'est mon fils Xavier qui l'a le mieux compris: "Il veut tuer la célébrité", m'a-t-il dit après que j'eus tenté de lui expliquer la mort de Jean Leloup.

Ce dernier s'explique probablement ailleurs dans ces pages puisqu'une rencontre était prévue mercredi dernier (mercredi prochain pour moi).
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Dernière mise à jour le 24 avril 2004.
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