Leloup au Métropolis : les moments parfaits
par Marie-Christine Blais
dans La Presse, 14 novembre 2009
Critique

«Les moments parfaits ne reviennent jamais», chante Jean Leloup. C'est vrai, mais ce qui compte, c'est qu'ils existent. Et vendredi soir, au Métropolis de Montréal, Jean Leloup a donné un spectacle extraordinaire, fait de moments parfaits...

On va dire ça simplement: cela fait 20 ans que je vois Jean Leloup sur scène et le spectacle de vendredi soir compte, hors de tout doute, parmi mon top trois. Un spectacle dans lequel Leloup a fait ce qu'il fait de mieux: de la musique, de la guitare, des tounes qui chaloupent, du groove. Bref, du bonheur, qu'une salle en transe a reçu, éberluée, trépignante, trépidante, incrédule, reconnaissante. Une salle remplie à se péter les coutures de gens très jeunes, jeunes et moins jeunes qui y ont tous trouvé leur compte et du plaisir. Ce n'est pas une farce: je crois sincèrement que ceux qui ont assisté à la représentation de vendredi vont la raconter pour les années à venir...

Juste Leloup à la guitare

Pas de gros band, pas de choristes, juste Leloup à la guitare, qu'il maîtrisait complètement, et trois musiciens d'enfer: David Mobio aux claviers, Charlie Yapo à la basse et Alain Berger à la batterie. Ils étaient quatre, et le Métropolis était rempli de leur musique. Une musique aux accents très reggae, très funk, quasi caribéens un moment donné ou même jazzy à la manière d'un Henri Salvador déjanté...

Et plein, plein de tounes, que plein, plein de spectateurs ont chanté à pleine, pleine voix avec Leloup: une dizaine tirée du récent album Mille excuses, Milady (Old Lady Wolf, Comme ils me font peur, Les moments parfaits, Lucie, La plus belle fille de la prison, Laisse-moi, Jeune Indien, etc.), une couple de Mexico (Le malheur, L'innocence de l'âme dans des arrangements années 60 très chouettes, et le délire hallucinant qu'est Everybody Wants to Leave, pur moment d'anthologie !), et puis deux chansons de La vallée des réputations (la chanson-titre dans des orchestrations caribéennes et Paradis perdu, chantée par tout le monde), et puis Les fourmis en personne, et même quatre chansons du Dôme, devant une foule ivre de joie: Faire des enfants (le deuxième morceau de la soirée, avec des arrangements très The Doors, la foule ne se pouvait plus !), Edgar, Sang d'encre et une version admirablement triste de La chambre... Avec, en ultime rappel pas préparé, un Leloup tout seul à la guitare qui chante la très poignante Recommencer.

Musicien complet

C'était aussi ça, la beauté: c'était parmi les chansons les plus «sociales» de Leloup que celui-ci interprétait - très en voix, il faut le dire, jouant de son registre avec une étonnante aisance, dans des éclairages magnifiques et une sonorisation impeccable. Avec son costume tiré d'un western spaghetti, oint de sueur, les yeux souvent fermés et la cigarette toujours pas loin («Je sais, je sais, je fume beaucoup», a-t-il laissé tomber, simplement), Leloup se laissait lui-même emporter et se révélait musicien complet. C'est tout juste s'il a lancé quelques remarques hilarantes sur Guy Laliberté («Je vais partir en dragster à Las Vegas afin de sauver l'eau de la Terre...»), parlé d'une chienne qui ne voulait pas mourir, raconté «je sais pas comment ça a commencé» pour expliquer que la musique l'a happé un jour... Toujours la musique l'emportait, pendant 2 h 45 entrecoupées d'un court entracte.

Dans la salle surchauffée, la foule était cool jusqu'au fin fond du Métropolis (j'en profite pour remercier le très gentil Samaritain qui m'a donné deux piastres pour que je puisse ne pas mourir de soif) et les spectateurs se souriaient mutuellement, comblés, émus, excités.

«Désolé de ne pas avoir été à la hauteur de tes attentes...» chantait Leloup dans Old Lady Wolf, en ouverture de spectacle. Vendredi soir, il n'avait aucune raison d'être désolé, Leloup était mieux qu'à la hauteur des attentes. Il était la musique. Stay, Johnny, stay...

Jean Leloup est en tournée au Québec jusqu'au 28 novembre.

Photo Bernard Brault, La Presse: Pas de gros band, pas de choristes, juste Leloup à la guitare, qu'il maîtrisait complètement, et trois musiciens d'enfer : David Mobio aux claviers, Charlie Yapo à la basse et Alain Berger à la batterie. Ils étaient quatre, et le Métropolis était rempli de leur musique.
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Dernière mise à jour le 17 novembre 2009.
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