Jean Leloup ne reste pas longtemps en place
par Presse Canadienne
dans La Presse, 26 mai 1999
Entrevue

Jean Leloup va bien ou il va mal, sans tiédeur triviale entre les deux. Parfois il a le goût de causer, parfois non. Tantôt il rigole, fait l'idiot ou fait semblant de l'être. Tantôt il rêve, observe, constate, déduit. Puis il rage ou s'émerveille. Sempiternel voyageur, il revient tout de même régulièrement ici offrir ce qu'il a grappillé en chemin, le tout enrichi par les visites des pays de sa tête qu'il ne craint guère de fréquenter.

«Tant que le monde sera mal dans sa peau, je ne veux pas être du monde», avait-il dit en 1990, à 29 ans. Près d'une décennie plus tard, avec une écriture et une recherche musicale raffinées au fil du temps jusqu'à donner Le Dôme et Les Fourmis, deux disques incontournables, Jean Leclerc, dit Leloup, évolue parfois lentement, parfois à vitesse effrénée, un rythme dévolu aux seules intelligences exceptionnelles.

«La chanson, explique-t-il, c'est une structure de base pour pouvoir s'amuser. À partir de cette assise, tout peut se transformer chaque soir. Un personnage peut changer, une chanson peut presque en devenir une autre. Le plaisir, par rapport au théâtre par exemple, c'est ce pouvoir de bouger, de bousculer, de recréer.»

Leloup et sa bande travaillent chaque fois consciencieusement la préreprésentation, trouvent de nouvelles idées, en font l'essai. Or, c'est fou ce que le chef de bande est à ce moment méticuleux. «Une fois les chansons faites, mon grand plaisir, c'est de mettre en scène. J'aime les jeux intelligents. Je m'amuse avec des musiciens chevronnés qui ont des sources musicales différentes qu'on peut mêler. Réinventer, c'est aussi l'fun qu'inventer. Et c'est plus difficile, donc plus gratifiant», poursuit Leloup.

«J'aime quand je peux mettre un band sur la route un mois, deux mois, trois mois. C'est le plaisir total, ajoute le chanteur. Je ne me produis pas en spectacle, j'amène du monde avec moi pour partager, pour qu'on crée ensemble, pour que les gens dans la salle sentent la complicité musicale. L'endroit alors importe peu.»

La présente tournée roule sur les chapeaux de roues. Partout on affiche complet. Mais déjà, il songe à repartir. «À l'automne. Probablement en Afrique ou au Congo. Je veux donner une nouvelle direction à mes textes, j'ai aussi deux romans en préparation, je vais travailler là-dessus en voyageant.»

Qu'est-ce qui fait carburer Leloup? La recherche du vrai, l'amour viscéral de l'écriture et de la musique, et peut-être la crainte d'être quelqu'un qui n'avance plus.

Photo: Photothèque La Presse: Jean Leloup
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Dernière mise à jour le 12 décembre 2004.
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