Les nuits de Jean Leloup
par Geneviève Bouchard
dans Le Soleil, 24 septembre 2011
Entrevue

(Québec) Il écrit quand tout le monde dort, change de personnalité musicale au fil des rencontres et s'est amusé à tourner un film «devinette» qui met au défi la «paresse mentale». Les horaires, les cadres, les conventions, très peu pour Jean Leloup...

«Afin de contrer les effets du formatage de masse, Johnny se recycle en héros de la guitare.» L'introduction du premier album du trio The Last Assassins met les pendules à l'heure : Leloup est devenu Johnny Welltipper. Avec ses complices Virginia Tangvald et Mathieu Leclerc, le musicien se frotte à un rock sale, teinté de blues, et délaisse le micro pour jouer les guitar heroes.

Au moment de notre entrevue, Jean Leloup était en répétition avec ses Last Assassins. «On pratique, on pratique... Ce sont des chanteurs qui sont nouveaux, Virginia et Mathieu», a-t-il confié, enthousiaste. Au bout du fil, les mots se bousculent, comme les idées dans la tête de Jean Leloup. Il saute du coq à l'âne, parlant de son groupe, de son film, du spectacle qu'il offrira vendredi au festival Envol et Macadam. Les trois projets sont intimement liés : la création de la trame sonore du film de Leloup, Karaoké Dream, a engendré le groupe The Last Assassins, dont les membres participent à la tournée Electric Voodoo Night, qui s'arrête à Québec cette semaine.

«Moi, je fais mes tounes, eux, ils jouent des chansons des Last Assassins, explique Leloup. Ça s'appelle Electric Voodoo Night parce que j'ai pensé à la musique que je fais pour moi, la nuit. Je joue de la musique trois heures par nuit. De temps en temps, il arrive une toune, mais en général, je joue plein d'affaires juste pour le fun.»

Pour la présente tournée, le musicien dit vouloir recréer sur scène le moment magique où une idée de chanson surgit, à l'heure où monsieur et madame Tout-le-Monde dorment sur leurs deux oreilles. «Le vrai moment, ce n'est pas quand la toune est composée au complet, c'est quand tu as eu l'idée, évoque-t-il. Je vais baser tout le show là-dessus. Je vais essayer de donner au monde exactement ce qui se passe pour de vrai, quand je compose la nuit.»

«Une charade»

S'il y a un fil conducteur entre les différents projets de Jean Leloup, c'est bien que l'artiste fait ce qui «le fait tripper». C'est vrai de son association avec Virginia Tangvald et Mathieu Leclerc, ça l'est aussi pour la production du film Karaoké Dream, étrange objet cinématographique que le public de la capitale pourra découvrir au Festival de cinéma de la Ville de Québec.

La formation The Last Assassins est née par la force des choses, alors que le trio planchait sur la trame sonore de ce film. «On composait des tounes et on s'est dit : "C'est le fun, on va faire un band." C'est tout!» raconte le musicien, qui a passé trois mois à Québec pour créer ces nouvelles chansons. Le projet se décline en anglais, tout simplement parce que Tangvald et Leclerc écrivent dans cette langue. Les chansons en français nées de leur collaboration, Leloup les garde pour son prochain album.

«J'avais plein de riffs de guitare que j'avais envie de jouer, mais je n'avais pas de texte pour mettre dessus, ajoute-t-il. Je leur ai dit d'en faire et eux, ils composent en anglais. Il faut laisser aller la vie. Si tu essaies tout le temps d'imposer à la vie ce que tu penses, tu ne vas jamais profiter des bonnes affaires.»

Quant au film Karaoké Dream, on ne se risquera pas à tenter une description. Le synopsis évoque des «capsules de psychose pure à 100 %», les extraits mis en ligne au www.karaokedream.tv laissent entrevoir un délire parfois sanguinolent d'arts martiaux, d'images saccadées et de couleurs saturées.

«C'est un film qui raconte l'histoire de beaucoup de gens qui sont pris avec des problèmes dans la tête, décrit le réalisateur. Mais c'est comme s'ils communiquaient les uns avec les autres. C'est assez étrange. Je me suis amusé avec plusieurs histoires en parallèle, mais dans le fond, c'est l'histoire d'un gros obèse de 50 ans qui s'en va dans un bordel rose. On ne sait pas ce qu'il fait là, mais pendant qu'il y est, on voit le film de son inconscient.»

On est loin ici du scénario hollywoodien. Jean Leloup en parle comme d'une devinette, d'une charade à élucider. «Faut que les gens soient patients, parce que c'est complètement pété, admet-t-il. Mais c'est pas juste pété. Il ne faut pas dire : "C'est pété, alors je ne me force pas." Ça, c'est de la paresse mentale. C'est pété, mais en même temps, attache ta tuque parce que tu as quelque chose à comprendre. Et celui qui trouve, il est bon en cr...!»

Le défi est lancé : les curieux - ou les courageux! - pourront voir Karaoké Dream au Théâtre Petit Champlain jeudi à 23h et vendredi à 19h30.

Vous voulez y aller?

QUI : Jean Leloup et The Last Assassins

QUAND : vendredi à 21h50

OÙ : parc de l'îlot Fleurie

BILLETS : 40 $ pour le passeport 3 jours; 35 $ en prévente pour un billet d'une journée

INFO : www.envoletmacadam.com

La Presse, Marco Campanozzi.La formation The Last Assassins est née de la collaboration entre Mathieu Leclerc, Jean Leloup et Virginia Tangvald à la trame sonore de «Karaoké Dream», un étrange objet cinématographique qu'on pourra voir au Festival de cinéma de la Ville de Québec.
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Dernière mise à jour le 1 octobre 2011.
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